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Mise en ligne le : 21 juin 2008 | Intervieweur :
Black.Roger
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Interview mail avec Achernar / Amar Ru : 1) Bonjour ORAKLE, pourquoi ce nom de groupe ? En quelques mots présentez nous les membres qui le composent. Achernar (Chant / basse / synths) : Salut. Pour les présentations, ORAKLE a été formé par Clevdh (Batterie) et moi-même (Chant, basse et synthés), qui sommes en quelque sorte les deux rescapés ; Amar Ru (guitares) est arrivé en 2002 lorsque nous nous sommes enfin décidés à concrétiser notre musique sur un premier album, et Eithenn (guitares) nous a rejoints en 2006 / 2007. Pour le nom, c’est une première question difficile, puisque je t’avoue que ça nous a un peu échappé avec le temps (rires). Sérieusement, la création du groupe sous le nom ORAKLE remonte au milieu des années 90, Clevdh et moi n’avions que 14 ans à l’époque ; nous recherchions quelque chose d’assez compréhensible dans beaucoup de langues, simple, et étions probablement attirés par la dimension mystique de cette figure. Je ne sais plus exactement de qui est venue cette proposition mais ça nous a accrochés tout de suite, rien de plus… Par contre, au fil des années, ce nom a pris dans nos vies une importance majeure, car là où de nombreux musiciens ont créé deux ou trois groupes dans leur « carrière », Clevdh et moi n’avons eu cesse de développer notre musique sous cet unique étendard. 2) « Tourments & Perdition », album tragique selon vous, racontez-nous un peu son enregistrement ! Avec le recul, en êtes-vous pleinement satisfaits ? Achernar (Chant / basse / synths) : L’enregistrement a eu lieu en février 2008, mais nous sommes d’abord passés par une longue phase de pré-production des titres dans mon home-studio, car étant donné la quantité d’arrangements nous ne pouvions pas arriver en studio avec une idée floue sur les morceaux. Concernant l’enregistrement en tant que tel, nous avons eu la chance, grâce à Philippe (Holy Records), d’accéder aux Studios Davout et de travailler avec Fernando Pereira Lopes, ingénieur du son notamment sur le dernier MISANTHROPE. Nous avons donc sauté sur l’opportunité, et vécu trois journées épuisantes au milieu d’un matériel hallucinant, afin d’enregistrer les parties de batterie et de basse. C’était d’ailleurs assez marrant pour nous, groupe underground, d’arriver le matin et de croiser les GORILLAZ qui venaient également faire une séance. La deuxième partie des prises, à savoir l’ensemble des guitares et le chant, a eu lieu dans la foulée à la MJC/Le Studio de Limours en région parisienne : un studio flambant neuf où nous avons pu amener notre matériel et travailler le plus tranquillement du monde… Enfin, j’ai enregistré les synthés et des parties supplémentaires de chant dans mon propre studio, où nous avons ensuite mixé l’album avec Fernando ; nous sommes tout de même retournés à Davout afin de traiter certains instruments avec le matériel audio haut-de-gamme dont ce studio dispose. Et pour finir, un travail fantastique de monsieur Bruno Gruel sur le Mastering… Une longue aventure donc, très éprouvante physiquement et moralement, mais aujourd’hui nous en sommes pleinement satisfaits ! Pour être honnête, contrairement au premier album il n’y a pas une chose que j’aurai souhaité faire différemment au moment où on l’a fait. Je pense que c’est un album qui au-delà de la musique en soi véhicule vraiment une ambiance particulière et personnelle, et c’est l’un des objectifs que nous nous étions fixé. 3) Allez-vous continuer à utiliser la langue de Racine, pour vos futures compositions ? Amar Ru (Guitares) : Nous n’envisageons aucunement d’adopter l’anglais. Je trouve d’ailleurs très paradoxal que l’on nous demande – très fréquemment au demeurant – pourquoi nous avons choisi d’utiliser notre langue maternelle plutôt que ce succédané dialectique qu’est l’américain (à ne pas confondre avec le british). Pose-t-on jamais la question inverse aux formations qui ont élu ce sous-anglais de cuisine ? Et pourtant, combien de « vocalistes » seraient capables de tenir une conversation en véritable anglais ? Cette évidence de l’anglais me navre : elle est le signe d’esprits colonisés par une sous-culture au rabais. Mais à l’évidence, ce non langage – car il ne dit rien d’autre que son absence de sens – peut avantageusement servir de cache-misère à des textes d’une banalité et d’une vacuité souvent consternantes (je pense notamment à ces panégyristes de la guerre qui feraient instantanément dans leurs braies s’il fallait qu’un jour ils aient à se battre). C’est la défaite de la pensée, comme l’eût dit Finkielkraut. Achernar (Chant / basse / synths) : Je suis d’accord, c’est mieux que Tokyo Hotel chante en allemand, au moins personne ne comprend. Personnellement, je ne suis pas farouchement opposé à l’anglais, qui reste une langue intéressante en termes de sonorités. Dans ORAKLE, j’écris des textes sous une forme plus ou moins « poétique », toutes proportions gardées, sans pour autant m’exprimer de la sorte dans la vie quotidienne. Le choix du français dans ORAKLE est surtout lié à la précision, à la profondeur sentimentale que l’on souhaite donner aux textes. Selon moi, le problème vient plus du fait que manifestement, pour beaucoup de groupes, il n’y a pas ce genre de choix à l’origine ; il y a uniquement cette évidence bancale que l’on pourrait résumer par « on fait un groupe de Metal, il faut écrire des textes en anglais ». 4) Quelles sont vos sources d'inspiration, et les compositions sont-elles l'œuvre d'un seul membre de la formation ? Achernar (Chant / basse / synths) : A vrai dire, pour ce nouvel album, nous avons pas mal modifié nos habitudes. Sur Uni aux cimes, Amar Ru et moi travaillions chacun de notre côté des riffs que nous proposions ensuite en répétition, où les titres étaient traditionnellement construits et arrangés. Cette fois-ci, pour "Tourments & Perdition", j’ai composé l’essentiel des parties de guitare seul, dans mon home-studio. Au départ pour des raisons assez prosaïques puisqu’Amar Ru était parti quasiment un an au Québec, mais aussi parce que j’ai un réel besoin d’être créatif, et que dans ce but je me suis aménagé un studio qui me permet de rapidement mettre en place des idées, des arrangements. Je dois avouer qu’au final c’est une méthode qui me correspond davantage, car pour moi créer des riffs suit exactement la même mécanique qu’écrire un texte : l’isolement, le temps, la réflexion et une certaine forme de retour sur soi me sont nécessaires, autant de conditions impossibles dans une salle de répétition. J’en sors généralement des choses beaucoup plus personnelles, intimes et intéressantes que lors d’un simple jam. J’arrivais donc régulièrement en répétition avec un CD et pas mal d’idées plus ou moins abouties, et c’est là que l’architecture des morceaux et les choix se sont mis en place, chacun donnant son avis et apportant de nouvelles idées selon la façon dont on ressentait les choses. Concernant les sources d’inspiration, elles sont nombreuses et probablement pour beaucoup insoupçonnées… J’imagine qu’elles sont plus ou moins identiques pour la musique et les textes, seul le langage diffère. Je pense que globalement on peut parler d’un ressenti sur certains thèmes, alimenté par des événements personnels, des réflexions et certaines lectures (par exemple le texte Dépossédés est né en grande partie sur la base d’une lecture approfondie d’ouvrages d’Antonin Artaud, André Breton, bref les débuts du surréalisme). Pour ce qui me concerne, j’ai toujours tendance à « mettre la vie en musique », un peu comme une BO continuelle dans ma tête (rires) ; donc n’importe quel événement, y compris quelque chose de complètement anodin comme un nuage qui passe devant le soleil, est potentiellement une source d’inspiration. Et puis, parmi nos influences, il y a bien évidemment toute notre culture musicale qui rentre en jeu : du Black-Metal bien sûr, mais également d’autres choses… J’ai beaucoup écouté les vieux Pink Floyd pendant une période où je composais, des artistes plus confidentiels, toujours un peu de musique classique aussi, car outre le plaisir, celle-ci m’apporte énormément d’idées pour les arrangements, les articulations entre les différentes parties, la définition de plages harmoniques pour chaque instrument, le mouvement et la dynamique. Evidemment ça se ressent moins puisque la base d’ORAKLE reste résolument Metal, mais ça n’en est pas moins une influence constante. 5) Avec la complexité de vos morceaux, n'est-il pas difficile de tout retranscrire en live ? Amar Ru (Guitares) : Naturellement nous n’abordons pas les concerts de la même manière que les séances d’enregistrement, cela pour des raisons purement techniques essentiellement. Il est impossible de restituer à 5 sur une scène l’ensemble des arrangements travaillés et retravaillés en studio. Toutefois, si l’approche est différente – l’une privilégiant l’énergie, quitte à sacrifier une part de clarté, l’autre l’aboutissement au détriment de la spontanéité – le fond reste identique. Par ailleurs Emmanuel de Lyr Drowning nous a rejoints récemment aux claviers, ajoutant une dimension supplémentaire très appréciable, nous rapprochant des sonorités de l’album. Cependant, et cela est valable pour quelque groupe que ce soit y compris pour ORAKLE, l’exécution d’un morceau en concert ne sera jamais identique à l’exécution en studio… ou il s’agit de playback. 6) Comment définiriez-vous votre musique, en quelques mots ? Amar Ru (Guitares) : Aïe, tu me demandes d’être juge et partie ! Pour ma part, mais cela n’engage que moi, je qualifierais avant tout notre musique d’ « inventive ». C’est certes très subjectif, mais je crois qu’avec ORAKLE, nous explorons des pistes originales dans le Metal. À ce propos, j’ai lu dans un webzine français que nous plagiions ARCTURUS. Je crois qu’il s’agit d’un malentendu (dans tous les sens du terme, celui de quiproquo… et d’écoute superficielle), car s’il est vrai qu’ARCTURUS est ancré dans nos références musicales, c’est d’abord parce que cette formation était capable de s’affranchir des conventions du genre. Alors oui, nous sommes nécessairement inspirés par l’écoute de leur œuvre (que l’on essaie de me faire croire que tel ou tel groupe a sorti sa musique du néant), mais nous avons une griffe originale, qui apparaît pour peu que l’on se donne la peine – un concept un peu dépassé de nos jours il est vrai – d’écouter attentivement Tourments et perdition dans son entier. Pour l’exemple, et toutes proportions gardées, nul ne prétend qu’Haendel a plagié Bach… et pourtant il était pour lui un maître dont il s’est largement inspiré pour produire une œuvre résolument originale. Je veux bien que l’on compare, mais avec un peu de finesse par pitié. Achernar (Chant / basse / synths) : Tu as oublié EMPEROR (rires). Non, sérieusement à mes yeux la musique d’ORAKLE se définirait avant tout comme sombre, puissante et émotionnelle. Et je pense d’ailleurs, pour rebondir sur ce que disait Amar Ru, que la comparaison avec les groupes précédemment cités vient surtout d’une manière assez proche d’arranger les morceaux, et aussi de la façon dont on souhaite les construire, à savoir comme des témoignages émotionnels forts plutôt que comme de simples morceaux de rock efficaces. Et de toute façon, je pense que la comparaison avec ARCTURUS vient à 90% de ma voix, donc à moins de financer une opération de mes cordes vocales, ça risque de nous suivre tant qu’on ne se mettra pas à la Country Music… 7) Quel style de métal ou autre, écoutez-vous ? Achernar (Chant / basse / synths) : J’écoute de la musique en assez petite quantité comparé à d’autres, mais en matière de Metal c’est principalement des artistes qui ont (ou ont eu) une démarche originale et forte d’un point du vue émotionnel : Emperor, Ved Buens Ende, Arcturus, Burzum, Opeth, Solefald, Metallica, Dodheimsgard, Morbid Angel, Peccatum… Par contre en règle générale j’évite les choses qui se contentent d’être juste « efficaces » ; car je recherche autre chose dans le Metal que de m’éclater en remuant la tête et en buvant des bières. A côté de ça je suis ouvert à des tas d’autres styles, des groupes plus ou moins affiliés « rock » comme Pink Floyd, Devil Doll, The Mars Volta, Radiohead, de la musique classique de temps en temps… A vrai dire, je manque un peu de temps pour écouter plus de choses. Amar Ru (Guitares) : Je n’écoute pour ma part que le ratio minima de Metal, des groupes comme les Guns, Enslaved, Arcturus, Emperor et j’en passe. Ma discothèque est presque exclusivement composée de musique baroque, classique et contemporaine (Pärt, Dussapin, Gorecki, etc.), de quelques groupes comme Depeche Mode ou Massive Attack… mais cela n’a que peu d’importance. 8) Passez-vous plus de temps à composer, ou plus de temps sur la route des concerts ? Comment faites vous la part des choses ? Achernar (Chant / basse / synths) : Malheureusement ce n’est ni l’un ni l’autre qui occupe la plus grosse partie de notre temps, c’est plutôt notre vie dite professionnelle, comme tout le monde. Nous n’avons pas trop le choix à ce niveau là, il y a un loyer qui tombe à la fin du mois ! Pour le reste, ça dépend des périodes… Pendant les 4 ou 5 mois qui ont précédé l’enregistrement de Tourments & Perdition, j’ai très peu dormi car je bossais quasiment toutes les nuits sur les morceaux, les arrangements… Et comme je te disais précédemment, j’ai besoin d’être créatif donc même en dehors d’ORAKLE, je passe du temps à composer ; de toute façon je suis personnellement plus à l’aise dans un studio à écrire que sur la route, même si j’adore ça aussi. Et à notre niveau, on ne peut pas prétendre jouer si souvent que ça, donc les concerts restent de très bons moments, mais occasionnels. Avec la sortie de ce nouvel album, on va tout de même essayer de concentrer autant de dates que possible et d’aller à la rencontre du public un peu partout, au moins en France. C’est quand même un réel plaisir que de donner vie à ses morceaux avec l’énergie du live. 9) C'est maintenant à vous de tenir le micro, alors allez-y, pour un dernier mot, une dernière phrase. Achernar (Chant / basse / synths) : Merci à toi pour cet entretien. J’espère que le public français va nous soutenir à fond avec ce nouvel album ; il nous a fallu du temps pour en arriver là mais quitte à paraître arrogant, je crois fermement que Tourments & Perdition est notre album le plus riche, et qu’il peut difficilement laisser indifférent. Pour les plus curieux, des extraits sont en écoute sur le Myspace et le site officiel www.orakle.fr. A très bientôt. |
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