INTERVIEWS

1 Bonjour Harun. Merci de prendre un peu de ton temps pour Pavillon 666. Je viens de chroniquer ton album « Reboot » qui est vraiment excellent et extrêmement complet et varié. Peux-tu nous parler de sa conception ? naissance des morceaux, composition, arrangements…
 

Et bien merci! Disons que cet album est aussi spontané que le précédent. Pour situer le contexte, je me suis retrouvé incapable de toucher un instrument pendant 6 mois suite à un burn-out en février 2023. Je cumulais beaucoup de fatigue entre la sortie de mon premier album solo, l’usine de pressage vinyle et mon travail au conservatoire. Je me rendais compte aussi que l’album que je venais de sortir n’était pas un nouveau départ mais plutôt la fin d’une période de ma vie artistique. J’ai ressenti un profond besoin de passer à autre chose. Ça n’a pas été facile, mais pour préserver ma santé, il a fallu que j’arrête tout pour me concentrer uniquement sur mon projet solo. C’est donc lorsque j’ai retrouvé l’envie de m’y remettre début août 2023 que j’ai eu l’idée de reconsidérer totalement mon projet artistique. J’ai tout d’abord fait une séance de 2 jours pour composer et enregistrer le premier titre « Lost In The Light » avant de l’envoyer à Fabien Devaux qui était en charge du mix/master de l’album. Puis lorsqu’on s’est appelé pour faire un premier point, il s’est permis de me dire qu’il manquait une ligne directrice forte bien qu’il trouvait cela déjà très bien. Pour lui, il fallait que je trouve une lead accrocheuse qui permettrait à l’auditeur de rentrer plus facilement dans le thème mais je trouvais le morceau très chargé déjà… Alors j’ai tout de suite pensé à des vocalises dessus mais je lui ai tout d’abord répondu que je n’avais pas de chanteur sous la main pour amener cela. J’avoue que sur le coup, j’étais déçu qu’il n’adhère pas directement mais voilà. Je ne sais pas ce qu’il m’a pris. Je lui ai répondu que j’allais faire un essai chant dessus sans trop y croire avant de raccrocher. Lorsque je lui ai renvoyé ça avec les voix le lendemain, il a été tellement surpris qu’il m’a demandé si c’était vraiment moi qui chantait dessus. Il m’a donc encouragé à travailler dessus pour voir jusqu’où je pouvais aller… j’ai finalement fait une dizaine de versions de « Lost In The Light » sur un mois avant de trouver ma voix. Du coup, j’ai pris confiance en moi et je lui ai annoncé que j’allais chanter sur tout l’album! Ensuite, il m’a fallu une semaine pour écrire et mettre en boite le 2ème titre, Last Days. C’est à partir de ce moment là, un mois et demi après le début de cette aventure que j’ai trouvé mon rythme de croisière et que j’ai eu cette sensation de maîtriser le chant. Les autres titres de l’album ont tous été composés et enregistrés en un jour ou deux à chaque fois, d’où le côté spontané de cet album. Au final c’est une vraie évolution artistique non prévue mais totalement assumée.



2 Il me semble que tu as tout joué toi-même, es-tu multi-instrumentiste depuis toujours ou as-tu appris quelques instruments pour ces morceaux ?

Alors tout seul, oui. J’ai bien enregistré les guitares et les voix mais j’ai programmé la basse et la batterie. Je suis multi-instrumentiste depuis que j’ai commencé à faire de la musique mais je n’ai pas le niveau de mes idées à la batterie par manque de pratique. Ça m’aurait demandé du temps pour m’approprier les thèmes et le résultat n’aurait pas été satisfaisant. Sans parler du fait que ça m’aurait coûté de l’argent pour faire des prises correct en studio… Pour la basse, c’est différent. J’aurais très bien pu en emprunter une et faire de bonnes prises car j’en joue plus souvent que de la batterie mais là aussi. J’ai préféré le côté pratique de la programmation. Le template basse/batterie que Fabien Devaux m’a installé collait bien à cette nouvelle esthétique alors je n’ai pas hésité un instant.


 
3 De quoi parlent tes textes ? La musique parait assez légère au départ et plus l’on s’immerge, plus la noirceur se fait sentir. Est-ce une volonté de ta part ?

J’évoque pas mal de choses que j’ai vécu et ressenti ces 2 dernières années. Je parle par exemple de mon rapport à la musique et de mes problèmes d’insomnie dans le single « Sleep ». De mon burn-out à travers « Blinded » ou encore de frustration dans « Motionless ». De colère à travers le single « Get Out » mais aussi d’espoir dans « Last Days » ou « Release Yourself ». Concernant la trame de l’album, la noirceur qui s’accentue à l’écoute n’est clairement pas calculée. À la base, j’étais parti sur une base chronologique avant de changer la track-list au dernier moment. J’ai finalement préféré jouer sur le rythme des enchainements.


 
4 Ton style en solo est bien différent de ce que tu fais avec Trepalium et Step in Fluid, même avec le premier en solo. J’ai ressenti beaucoup d’influences, quels sont tes maîtres en musique ?

J’en ai beaucoup trop pour en parler ici mais ces 2 dernières années, j’ai clairement replongé dans le grunge, la new wave mais aussi la pop. J’ai réécouté beaucoup de Alice In Chains, Pearl Jam, Nine Inch Nails, Type O Negative, Depeche mode, Tears For Fears, QOTSA, Paramore, Dua Lipa, Jeff Buckley, David Crosby…

 

5 Pourquoi n’avoir pas pris d’autres musiciens pour t’accompagner ? Est-ce pour mieux faire ressentir une réelle introspection, des sentiments personnels, intimes ?

Ouais, c’est un peu ça mais pas que. C’est surtout que pour une fois, j’avais les moyens techniques et le savoir-faire pour tout gérer moi même. Je préfère ne pas être dépendant d’autres musiciens tout simplement.


 
6 Ta reprise de Shout de Tears for Fears est très forte et moderne. Es-tu fan de la new wave des années 80 ? J’ai également ressenti une forte influence Depeche Mode, surtout dans les premiers morceaux.

Plutôt oui. J’ai toujours aimé la new wave et ses dérivés mais je n’ai jamais vraiment eu l’occasion d’en faire avant. Étant né en 1980, les clips de Depeche Mode, Tears For Fears, Fine Young Cannibals, INXS ou encore The Cure font partie de mes souvenirs. Le fait de repartir de zero artistiquement m’a donné envie d’exploiter ces esthétiques. Par contre, lorsque j’ai commencé à chanter pour cet album, je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite que je tendais vers ça. Les derniers titres composés pour Reboot sont d’ailleurs Get Out et Sleep et ça se sent. C’est pour ça que je les ai mis au début de l’album et que j’ai eu cette envie de reprendre Shout de Tears For Fears. J’ai voulu assumer cet aspect là de mon son.



7 Selon toi, y a-t-il eu une évolution par rapport à ton premier effort solo, « In motion » ? A part l’ajout du chant bien sûr.


Oui car « In Motion » est plus proche de ce que j’ai pu composer pour Step In Fluid. C’est plus prog-fusion/world music alors que sur « Reboot », j’évolue sur un registre Post-punk / Cold wave / Grunge en format chanson. C’est moins fourni et plus accessible.



8 J’ai lu quelque part que l’aventure Trepalium s’est arrêtée. Pourquoi ce choix ?


Nous ne l’avions pas annoncé publiquement mais le groupe était en standby suite au départ du chanteur Renato Di Folco. À côté de ça, suite à la période Covid, nous ne tournions plus vraiment depuis 2020 alors il fallait arrêter les frais pour avancer chacun de notre côté.



 
9 As-tu prévu une suite aux deux albums de Step in Fluid ? Si oui, sera-t-il toujours instrumental et pourquoi ce choix ?

Alors le problème de Step In Fluid c’est que nous nous sommes retrouvés sans tourneur pour assurer la promo peu de temps après la sortie du 2ème album puis la Covid est arrivée. Donc le groupe est en standby pour l’instant. Impossible de t’en dire plus.


 
10 Si tu pouvais faire revenir un ou une artiste d’entre les morts, quel serait-il (ou elle) ?

Je ne sais pas trop. Freddie Mercury, Layne Staley, Dimebag Darrell, Prince ou encore Jeff Buckley? Y’en a tellement…

 

11 As-tu prévu de tourner avec Reboot ? Te sens-tu prêt à chanter en public ?

Oh oui! Je suis prêt, mes musiciens sont prêts et je suis actuellement en train d’essayer de booker des dates pour tourner à partir de début 2025. À suivre…

 

12 Musicien est-il ton métier ? Arrives-tu à en vivre ?

Actuellement non mais mes projets s’autofinancent, ce qui est déjà bien. Mais pour en vivre, il faudrait déjà que je puisse repartir en tournée. Mais j’espère bien changer la situation avec cet album.


 
13 Merci pour tes réponses et je te souhaite beaucoup de succès. Le mot de la fin est pour toi, si tu le désires.

Et bien merci à toi et à Pavillon Webzine, merci au lecteurs et à bientôt sur scène!