PORTA NIGRA Fin de siècle [ 2012 ] |
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CD Album Durée : 50.58 Style : Dark black metal |
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Chronique : 14 novembre 2012 , réalisée par Nebelgesang | ||||
Nous ne le répéterons jamais assez : les recruteurs de Debemur Morti productions ont le nez fin, et devraient sans doute offrir leurs services aux sections « transfert » de maints grands clubs sportifs qui se fourvoient dans des dépenses, au détriment du talent. On pourrait même dire que les tenants de ce label possèdent, à l’instar de Code666, un certain don pour dénicher des groupes inspirés, « authentiques », et qui ne galvaudent pas la mention « black metal » généralement juxtaposée à leur style. Les Allemands énigmatiques de PORTA NIGRA sont de ceux-là et nous délivrent, peu de temps après l’EP « Megalomaniac », leur premier album, sobrement intitulé « Fin de siècle ». À la vue des photographies diffusées par le groupe et de l’artwork made in Metastazis qui, comme d’habitude, convaincra ou non, il apparaît clairement une esthétique précieuse qui rebutera peut-être, au premier abord, les moins avertis. En effet, l’aspect visuel du binôme explore, à n’en point douter, l’univers « fin de siècle », une sorte de mélange de décadentisme et de romantisme noir, entre Chateaubriand et Huysmans. Passées ces quelques considérations esthétiques, que nous propose donc PORTA NIGRA ? S’il fallait être synthétique, en une phrase, il serait bien compliqué de définir, classifier, la musique du duo de Koblenz. Le label la décrit comme un « decadent dark metal » ; l’idée y est, mais c’est encore bien peu dire. « Dekadente Nächte » illustre d’emblée les tensions inhérentes au style rituel, relativement accessible, « allemand », et hétérogène, de « fin de siècle ». Les rythmiques et tempi oscillant entre down et mid-tempo, les chœurs rituels réverbéré, accolés à des voix écorchées, éclatées, outrées, les guitares dissonantes de Gilles de Rais, ses leads et mélodies acérés (voire même quelques soli) rappelant çà et là les compatriotes de SECRETS OF THE MOON. Cet album princeps est une machine bien huilée, riche, complexe, qu’il faudra apprivoiser, tant son évolution, sa progression régulière, ses aspérités multiples, désarçonneront continuellement. Chacune des sept compositions possède sa propre vie, sa propre histoire, apportant une variété non désagréable, tant l’architecture d’ensemble est cohérente. En atteste notamment l’enchainement entre le titre liminaire et « Megalomaniac », plus lancinant, mélodique, avec l’immixtion de voix claires qui secondent idéalement les hurlements érayés ou déchirés d’O... assez proches de ceux de Nattramn (SILENCER). Diverses dans leur composition, diverses dans leur agencement, les compositions de « Fin de siècle » explorent les différents horizons d’un dark/black metal aux ambiances et émotions graves. Gil de Rais sait condenser, nourrir, exprimer ses idées sans pour autant perdre de vue son fil directeur. Et c’est bien ce tour de force que réussit PORTA NIGRA : varier dans la pure continuité, retrouver les élans de brutalité, de rage et de désespoir, de la « Belle époque » parisienne, partagée entre sa décadence des élites, ses scandales et tensions politiques, son désir de « Revanche » et opulence déchue. Parfois groovy, souvent viscérale et mélancolique dans ses développements et progressions, (cf. « Der Spiegel » ou « Aas de Meere »), il ne manque pas grand chose pour faire de cet album une des sorties majeures de l’année. Peut-être encore un soupçon d’originalité, de personnalité à réaffirmer. Puiser çà et là l’idéalisme morbide des décadentistes, retrouver l’ivresse opioïde des ruelles sombres des capitales européennes, à l’aube des grandes guerres du XXe siècle. « Fin de siècle » profite ainsi de sa richesse musicale, de ses influences digérées et réappropriées, de ses nuances, et d’une exécution sans faille. Gavé jusqu’à la moelle, ce premier album est un condensé exquis, une architecture stratifiée de metal extrême tout en nuances, tout en subtilités et gangréné par sa propre rogne, ses propres éclats, issus d’un siècle éteint. Siècle décadent, le nôtre, le leur, celui de Huysmans et de ces quelques lignes extraites d’ « À rebours » : « Ah ! fit-il, dire que tout cela n’est pas un rêve ! Dire que je vais rentrer dans la turpide et servile cohue du siècle ! Il appelait à l’aide pour se cicatriser, les consolantes maximes de Schopenhauer ; il se répétait le douloureux axiome de Pascal « L’âme ne voit rien qui ne l’afflige quand elle y pense », mais les mots résonnaient, dans son esprit comme des sons privés de sens ; son ennui les désagrégeait, leur ôtait toute signification, toute vertu sédative, toute vigueur effective et douce ». |
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