CHRONIQUES ALBUMS

Les allemands de Neaera, si l'on décide de les cataloguer Metalcore, font définitivement partie de la frange la plus radicale du mouvement. "Armamentarium", leur troisième album en trois ans (on ne chôme pas chez les teutons), est un véritable rouleau compresseur, sans concession. Peut être trop, même…

Ce qui frappe d'entrée, c'est le son du disque. Il est énorme. Tout simplement. Tellement énorme que l'on en vient à se demander si ce n'est pas destiné à cacher une cruelle misère créative.
Aux premières écoutes, on est rassuré, Neaera pousse son death metal mélodique teinté de metal core dans les derniers retranchements de l'agressivité. Car ici, on ne peut plus vraiment parler de metalcore, on s'approche plus des débuts d'In flames (le refrain de "Synergy" est flagrant) tant les compos sont radicales, efficaces et rapides. Les passages lourds typiquement hardcore sont relativement discrets, laissant grande place à des riffs mélodiques sur fond de blasts beats, ça sonne presque black metal par moment tant le tempo est rapide et les riffs agressifs ("Mutiny of untamed minds").
Les vocaux se partagent entre un chant criard typique metalcore et un chant guttural bien profond; l'alternance des deux est parfois totalement jouissive ("Harbinger"). On regretterait presque que cette dualité ne soit pas plus poussée car le chant criard, qui reste majoritaire, tend à devenir monotone sur la longueur. Pas de voix claires par contre ici, et ce n'est pas forcément un mal quand on entend le résultat chez certains de ses collègues.
"Armamentarium" est un album surpuissant dont on sort abasourdi…mais qui possède néanmoins un durée de vie bien faible. En misant sur l'efficacité et la puissance, l'album semble au final manquer de relief, de variations. Au bout de quelques écoutes, on finit par ne plus distinguer vraiment les titres entre eux, et d'avoir l'impression d'écouter une déflagration continue. D'autant que l'on ressent souvent une impression de déjà entendu. C'est regrettable, car Neaera a du talent et sait composer des mélodies intéressantes et des passages d'anthologie. Mais un gros son ne suffit pas à se démarquer, une plus grande prise de risque aurait put définitivement hisser ce groupe au dessus de la masse.

"Armamentarium" ressemble à une superproduction hollywoodienne, un habillage à couper le souffle, mais une substance pauvre ou déjà usée. Il bastonne très dur, s'écoute avec beaucoup de plaisir, mais finira trop vite au placard. A mon avis, ce n'est pas suffisant pour qu'un groupe passe de "suiveur" à "meneur".