CHRONIQUES ALBUMS

Verso est un projet originaire des Hauts-de-France composé d’un duo familial : Frédérique et Gauthier Delbarre - alias Sardinas et RoyalG – respectivement mère et fils. La musique du groupe se caractérise par un audacieux mélange des genres et des ambiances, alliant sans complexe black metal et doom mélancolique à des sonorités plus pop et rock, imprégnées çà et là d’élégantes touches de gothique. Après un EP de trois titres, « Inéluctable », paru au printemps 2020, Verso revient cette année pour présenter son premier album : « Éclats ».

Comme son nom le laisse imaginer, Verso semble avoir été pensé autour du concept de dualité. Au niveau musical, évidemment, avec un spectre d’influences aussi variées que surprenantes et des compositions qui alternent habilement douceur et brutalité, l’antinomie des voix et du chant des deux membres du groupe séant à merveille à cette opposition, mais également au niveau esthétique. Verso a en effet déjà développé un univers visuel marqué et saisissant, comme en témoignent la superbe pochette de l’album, signée Yann Mouillard, ainsi que le clip vidéo de la chanson « Le Monde Noir », tout en noir et blanc, dont les paroles mettent en avant cette dichotomie des couleurs et les sentiments qu’elles traduisent, entre espoir et résignation. Les textes de l’album sont d’ailleurs tous écrits en français, ce qui renforce assurément, pour l’auditeur dont il s’agit de la langue maternelle, le poids de l’urgence qu’ils véhiculent ; ce sont des émotions brutes et sincères qui sont délivrées tout au long du disque, à travers des paroles bien pensées, poétiques et lourdes de questionnements profondément introspectifs. La noirceur des hurlements du chanteur est soigneusement contrebalancée par le chant clair et lumineux de sa partenaire musicale, conférant à l’album un équilibre maîtrisé entre instants de violence et d’apaisement, à l’instar de titres tels que le morceau d’ouverture « Hors de Contrôle » ou encore le remarquable « Kikazaru ». Certaines chansons, telles que la frénétique « Dernière Braise », se démarquent par leur agressivité, là ou des morceaux comme « Non Coupable » et « L’Autre Moi » s’avèrent éminemment mélancoliques. Ce dernier, particulièrement sombre, brille par le sentiment d’affliction qu’il instille et l’utilisation de cordes, ici violon et viole d’amour, qui viennent le magnifier. Jouées par Constance Eve et Yvain Delahousse, ces cordes s’expriment également à merveille sur la psychédélique « Hallucination », à la fois douce et angoissante, dont le style très gothique est finement développé. Pour les autres musiciens qui ont collaboré au disque, il faut citer Sylvain Lenne, qui a composé et enregistré la batterie et les percussions, Vincent Vieville, qui en plus d’avoir assuré la basse s’est occupé de l’enregistrement et du mixage de l’album, ainsi que Valentine Crépel et Geneviève Meven à qui l’on doit les chœurs.

La musique proposée par le duo est le résultat d’un mélange d’opposés, chacun mis en valeur par la force des contrastes ainsi formés. Entre ténèbres et lumière, espoir et effondrement, mais également à l’image de la diversité des genres qu’il combine, Verso est pourvu de nombreuses facettes qui, une fois assemblées, constituent un tout surprenamment cohérent. Aventureux, « Éclats » transcende les frontières et, bien qu’il pourrait s’avérer difficile à appréhender pour les adeptes d’un metal plus cloisonné, séduira sans nul doute l’auditeur qui se laissera emporter par le voyage auquel cet album l’invite.